Par Nathalie Rouvet Lazare et François Bavoillot – Septembre 2024
C’est bien dès aujourd’hui que les entreprises françaises doivent considérer précisément et de façon opérationnelle la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Initiative) : l’ordonnance du 6 décembre 2023 et son décret d’application du 30 décembre 2023 ont mis en place de nouvelles règles pour toutes les sociétés commerciales avec une mise en œuvre progressive dès 2025. Ainsi, la transposition de la directive européenne « CSRD » constitue une étape importante dans l’évolution du reporting durable mais aussi dans le fonctionnement des organes de gouvernance et les pratiques des administrateurs et des conseils d’administration ou de surveillance.
Une question à traiter dès 2025
Cette directive entre en vigueur – comptes 2024 pour publication 2025 – et concernera progressivement à l’horizon 2028 plus de 50 000 entreprises de l’Union Européenne, aussi bien grandes entreprises, ETI, PME, cotées ou non, familiales ou non dès lors qu’elles atteignent certains seuils.
Il s’agit pour ces entreprises de publier un reporting de durabilité selon des normes standardisées, la durabilité recouvrant les questions environnementales, sociales et de personnel, le respect des droits de l’homme et la lutte contre la corruption. Les politiques des entreprises en la matière seront détaillées, les objectifs énoncés et les suivis publiés chaque année dans une nouvelle section spécifique de leur rapport de gestion présenté en Assemblée Générale et publié par la société.
Une question de stratégie et de modèle d’affaires
Tout le périmètre de l’entreprise est concerné, de la stratégie à l’opérationnel ainsi que toutes les parties prenantes, et intégré dans l’analyse des risques et des opportunités ; il ne s’agit pas que d’une norme de reporting d‘autant que les trois quarts des informations requises ne sont pas quantitatives mais qualitatives. Les entreprises vont devoir expliquer dans leurs stratégies comment elles comptent intégrer leurs enjeux, en double matérialité* : les informations de durabilité doivent en effet répondre au principe de « double importance ou double matérialité1 », et permettre de décrire les conséquences de l’activité de la société sur les enjeux de durabilité.
Une question d’information et de certification
La profondeur de champ est supérieure à celle de la Déclaration de Performance Extra-Financière : l’analyse de double matérialité amène à chiffrer les risques que font peser les enjeux ESG sur la pérennité de l’entreprise, en complément de l’évaluation de l’impact de l’activité de l’entreprise sur les personnes et l’environnement.
Les informations de durabilité devront figurer dans une section spécifique du rapport de gestion de la société, et l’ordonnance transposant la directive CSRD met également en place une mission de certification des informations en matière de durabilité. Elle définit à cet effet les modalités de désignation des personnes chargées de ces missions de certifications en autorisant l’intervention d’un Organisme Tiers Indépendant en plus de CAC.
Sont également prévues des mesures de contrôle et de sanctions potentielles, notamment des procédures d’injonctions pour les cas de manquement aux dispositifs d’information sur la durabilité : le nouvel article L 238-1 du Code de commerce ouvre ce droit à toute personne qui n’a pas obtenu de la part des organes de gouvernance les informations pertinentes en matière de durabilité. Par ailleurs le Code de la commande publique a été complété afin de donner la possibilité aux acheteurs publics d’exclure la société des contrats de la commande publique en cas de non-respect de l’obligation de publier des informations de durabilité. Enfin, les AG pourraient être annulées en l’absence de désignation d’un CAC ou d’un OTI.
Une question de gouvernance
Pour se conformer au volet Gouvernance de la nouvelle directive, les entreprises doivent fournir des informations visant à décrire les procédures et dispositifs de contrôle destinés à suivre et gérer les enjeux de durabilité matériels et les pratiques de gouvernance en la matière. Cinq axes de gouvernance sont définis : rôle des organes d’administration, de gestion et de surveillance ; informations fournies au titre des questions de durabilité abordées par les organes d’administration, de gestion et de surveillance de l’entreprise ; intégration des performances liées aux critères de durabilité dans les politiques de rémunérations variables ; déclarations relatives aux « diligences raisonnables » en matière de durabilité (notion relative au devoir de vigilance) ; procédures de contrôle interne et de gestion des risques en matière de reporting de durabilité. Le rôle de la gouvernance dans la supervision des enjeux de durabilité devient de plus en plus important, tant en termes de suivi des questions relatives à l’élaboration que de contrôle des informations en matière de durabilité qui viendront nourrir les documents corporate et stratégiques de la société.
Associés en Gouvernance accompagne les entreprises sur ces questions de gouvernance CSRD & Durabilité
Pour ce faire, l’intervention suit la méthodologie ci-après :
- Revue de l’existant sur l’ensemble des périmètres concernés (financiers et extra financier, RSE, compliance et vigilance, dispositif de gouvernance).
- Ecarts vs la réglementation et proposition d’une feuille de route.
- Accompagnement dans la mise en œuvre, par exemple en matière d’optimisation des documents de gouvernance tels que les règlements intérieurs des instances, d’articulation des responsabilités entre Conseil d’administration et comité en charge de la durabilité, de préparation du reporting de durabilité.
En effet, le reporting de durabilité devra par exemple préciser la composition des organes d’administration, de direction et de surveillance ainsi que le comité en charge des questions de durabilité, leurs rôles et responsabilités en matière de surveillance des impacts, risques et opportunités, la manière dont la supervision est organisée et formalisée.
Ainsi, l’accompagnement spécifique sur les enjeux CSRD / durabilité permet d’identifier les impacts tant dans l’organisation que le fonctionnement des instances de gouvernance ; les mesures nécessaires notamment dans l’articulation et le contenu des périmètres de responsabilités entre conseil et comités, le cas échéant la mise en place si nécessaire de nouvelle(s) instance(s) ; ainsi que l’organisation du traitement des sujets opérationnels.
Nathalie Rouvet Lazare – Associée
0608720974
François Bavoillot – Avocat au Barreau de Paris et Senior Advisor
0618570324
1Le principe de double matérialité est défini dans la norme ESRS (Régl. délégué UE 2023/2772 annexe 1, ESRS 1 par 2 et 21.