Mesurer la contribution individuelle de l’administrateur

Par Emmanuel du Boullay et Olivier Manière – Mars 2019

La mesure de la contribution individuelle des administrateurs répond aux attentes des autorités de place et des investisseurs. Cette bonne pratique de gouvernance rencontre parfois des difficultés et des réticences qu’il convient de surmonter.

Au cours des prochaines Assemblées générales, de nombreux administrateurs seront renouvelés ou nommés. Leur sélection repose sur des critères de plus en plus exigeants de compétence, disponibilité et contribution individuelle aux travaux du Conseil.

Lors de l’évaluation du fonctionnement du Conseil, se pose la question délicate de la mesure de la contribution individuelle des administrateurs au regard des attentes qui avaient présidé à leur sélection.

Le code Afep-Medef1 invite de façon explicite les sociétés qui s’y réfèrent à évaluer la contribution individuelle des administrateurs aux travaux du Conseil et des comités dont ils sont membres. L’autorité de surveillance du marché boursier (AMF2) insiste sur le respect de cette préconisation.

Cette démarche tend à se développer. Bon nombre d’entreprises, cotées ou non cotées, dont les Conseils cherchent à améliorer l’efficacité de leurs travaux dans un environnement toujours plus complexe et exigeant ont déjà fait ce choix.

Les questions à se poser

Dans ce contexte, tout administrateur soucieux de bien remplir sa mission est invité à se poser les questions suivantes :

  • Qu’est-ce que j’apporte au Conseil ?
  • Ma contribution aux travaux du Conseil et des comités facilite-t-elle l’exercice de leurs missions ?
  • En quoi ma participation aux débats renforce-t-elle la capacité du Conseil à prendre les « bonnes » décisions ?

L’analyse de sa contribution individuelle portera ensuite sur les points suivants :

  • Temps consacré à la préparation du Conseil ou des comités : prise de connaissance de l’ensemble des points à l’ordre du jour, avec un focus sur les points pour décision ; relecture précise du PV de la réunion précédente ; demandes d’informations complémentaires préalablement aux réunions.
  • Participation aux débats : assiduité ; prise de position utile (mise à disposition de ses compétences spécifiques) et constructive (assertivité) ; hauteur de vue.
  • Connaissance des autres administrateurs et des principaux dirigeants : identification des forces et faiblesses afin de pouvoir s’appuyer à bon escient sur les compétences et expériences de chacun ; capacité à créer du lien.
  • Suivi des décisions : veiller au suivi organisé des décisions ou des demandes du conseil (tableau de suivi).
  • Formation ou information entre les réunions : compréhension du modèle économique, connaissance du contexte concurrentiel ; formations adaptées (surtout pour les membres des comités spécialisés).

Méthodologie et communication

En termes de méthodologie, une pratique efficace nous paraît être la suivante :

  • Elaborer un questionnaire d’auto-évaluation reprenant les différents thèmes ;
  • Faire compléter ce questionnaire par chaque membre du Conseil et des comités, lequel doit évaluer son propre degré de satisfaction ou frustration et ses attentes (information/formation) ;
  • Organiser un échange, si possible une fois par an, entre le Président du Conseil et chaque administrateur sur ces thèmes.

Une fois la mesure des contributions individuelles réalisée, la communication dans le rapport annuel sur la gouvernance est une étape clé : information sur le processus adopté, les thèmes sélectionnés et les actions d’amélioration retenues. Le rôle du Président dans la formalisation de la synthèse sera essentiel.

L’étude que nous avons conduite en 2018, sur le périmètre CAC40 et Next20, montre que plus de la moitié de ces sociétés, contre un tiers en 2016, ont mis en pratique ce processus d’évaluation de la contribution individuelle, mais très peu communiquent sur la méthode et les thèmes abordés.

Les réticences exprimées par certains administrateurs doivent être surmontées par la garantie de confidentialité de leurs réponses et par le témoignage des administrateurs qui ont déjà expérimenté cette auto-évaluation de leur contribution individuelle (notamment au Royaume-Uni).

L’exercice est particulièrement sensible, surtout la première fois, et il requiert l’implication forte du Président du Conseil. Notre expérience des évaluations nous a cependant montré que les présidents et administrateurs eux-mêmes reconnaissaient le vrai progrès apporté par cette démarche dans leur capacité à exercer collégialement leurs missions.


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1 Afep-Medef : un des objectifs de l’évaluation vise à « apprécier la contribution effective de chaque administrateur aux travaux du conseil. » (juin 2018, art. 9.2) :

2 AMF : recommande que « toute exclusion de la mesure de la contribution effective de chaque administrateur aux travaux du conseil ne soit pas justifiée par le seul caractère collégial du conseil mais donne lieu à des explications circonstanciées et adaptées à la situation particulière de la société » (Rapport 2017 sur le gouvernement d’entreprise)

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